Dernière ligne droite avant l’arrivée : Ma participation à l’édition 2016 du marathon de Philadelphie

27 novembre 2016

Après 22 semaines d’entraînement, une blessure, d’innombrables réveils au petit matin et de longues séances de running le samedi, Rachel est finalement parvenue à être fin prête pour le départ de l’édition 2016 du marathon de Philadelphie. Découvrez en détail les coulisses de son marathon.

” La semaine précédant le marathon, j’étais une vraie boule de nerfs. Le pire, et quiconque ayant déjà participé à une course de fond vous le dira, c’est que cette semaine est aussi une phase de dégression où la distance parcourue est réduite au minimum et où l’objectif principal est avant tout de se reposer. Courir est souvent le seul moyen qu’ont les coureurs de fond pour évacuer le stress, ils ressentent donc souvent le fait de moins courir comme une sanction cruelle et injustifiée.
Malgré mon agitation et mon étrange émotivité, je suis quand même parvenue au vendredi soir en un seul morceau. J’avais un vol de 9 heures pour Philadelphie le lendemain matin, j’ai donc fait mes valises, ressassant jusqu’à l’obsession ma longue liste de choses à emporter, paniquant à plusieurs reprises car je croyais avoir oublié quelque chose d’essentiel, pour finir par emmener bien trop de vêtements. Bien que je me sois couchée à une heure raisonnable, je me suis tournée et retournée dans mon lit jusqu’à environ 1 h 30 du matin tellement j’angoissais.
Quand je me suis levée le lendemain à 6 h, je me sentais au 36ème dessous. Les spécialistes affirment généralement qu’il n’y a pas à s’inquiéter si l’on n’a pas bien dormi la veille d’une course importante car c’est en fait le sommeil engrangé deux nuits avant l’événement qui vous fournit l’énergie dont vous avez besoin. Mais deux nuits avant la course je n’avais dormir que 4 heures et quart ! Inutile de vous dire que je me rongeais les sangs à l’idée de ne pas bien dormir non plus la nuit suivante et d’être épuisée le jour de la course.
Heureusement, tout s’est finalement bien passé. Après un vol très agréable, un passage à l’expo pour récupérer mon dossard, une soirée tranquille à regarder Netflix et un dîner constitué principalement de bretzels, je me suis finalement endormie comme un bébé juste après 21 heures, complètement épuisée.
Quand mon réveil a sonné à 5 h le lendemain matin, je me sentais parfaitement réveillée et plutôt bien reposée. En fait, j’étais tellement soulagée d’avoir bien dormi que toute ma nervosité s’était envolée. J’ai bu des tonnes d’eau en m’habillant et en me préparant pour la course, avant de passer au café pendant que je détendais et étirais mes jambes à l’aide d’un Foam Roller. Après avoir avalé un autre café et mon petit déjeuner, il était 5 h 50 du matin quand je suis finalement sortie. Il faisait encore nuit noire. J’ai marché pendant environ 5 minutes pour arriver aux contrôles de sécurité, où je m’attendais à trouver une foule de gens. Il n’y avait en fait que quelques coureurs qui faisaient les cent pas, je me suis donc dirigée directement vers le parcours. En fait je n’aurais pas eu besoin d’arriver sur place si tôt !
Ce matin-là, il y avait beaucoup de vent et la température avoisinait les zéro degrés. Heureusement que je m’étais acheté un sweat-shirt Target à 15 $ assez moche pour le porter par-dessus ma tenue de running, ça m’a permis de me réchauffer en attendant. Un peu après 6 h 30, la zone de départ a commencé à se remplir et les corrals ont été mis en place. J’ai repéré mon corral, celui flanqué de drapeaux gris et destiné aux participants prévoyant de terminer la course en 4 heures, je me suis assise sur le trottoir et j’ai attendu jusqu’à un peu avant 7 h, entourant mes jambes de mes bras pour me réchauffer.
Depuis ma blessure, mon nouvel objectif consistait à tenter de terminer la course en moins de 4 heures, soit une allure de 5’41” au km, en comptant les arrêts pour boire (là je dois m’arrêter et marcher car je suis incapable de courir et de boire en même temps). Je comptais commencer lentement et essayer simplement d’adopter une allure tranquille sans trop me soucier de ma vitesse puis voir par la suite si mon objectif était toujours réalisable.

L’heure du départ approchait ! J’ai enlevé mon sweat-shirt (les organisateurs de la course les récupèrent pour en faire don à des associations) et j’ai respiré bien à fond. Comme il y avait de nombreux coureurs dans les corrals situés devant le mien, il m’a fallu près d’un quart d’heure pour atteindre la ligne de départ. Sans même que je m’en rende compte, les gens devant moi se sont alors mis à courir. Quand j’ai franchi la ligne de départ, j’avais tellement froid que je ne sentais plus mes pieds et il a fallu plusieurs kilomètres pour que mon corps se réchauffe vraiment. En plus, après environ 1 km, le groupe de 4 heures m’a dépassée à toute vitesse, courant à près de 5’35” au kilomètre, me laissant loin derrière. J’espérais les revoir en fin de course mais je savais que ce n’était pas gagné.
Mon principal problème était que quand je vérifiais mon allure, j’étais proche soit des 6 minutes, soit des 5 minutes, mais mon ressenti restait le même quelle que soit ma vitesse. Mon organisme oscillait sans cesse entre énergie et montée d’adrénaline et fatigue, découragement et sensation de soif. Il me faut généralement plusieurs kilomètres pour m’installer dans une course, j’ai donc essayé de ne pas paniquer mais plutôt de profiter des incroyables encouragements du public, de la musique et des pancartes humoristiques qui jalonnent le parcours.

Temps de passage à 10 kilomètres : 58’36 » à une allure de 5’51 » au km

Une heure s’était écoulée et je commençais à me sentir mieux. Au kilomètre 11, j’ai mangé mes 3 premières dates. C’est alors qu’a débuté la partie en montée. Le parcours du marathon de Philadelphie est relativement plat, mais il y a une montée particulièrement difficile et étonnamment longue aux alentours du km 14. À mi-hauteur de nombreux coureurs se mettaient à marcher mais je refusais de m’arrêter. J’ai repris mon souffle dans la descente, me réjouissant du fait que la montée soit désormais derrière moi.
À ce moment-là, j’avais atteint le km 18 et j’avais besoin de me fixer un nouveau mini-objectif pour me concentrer dessus. Mentalement, la seule façon de finir un marathon est de diviser le parcours en différentes parties. Mon fiancé devait m’attendre au km 22 alors je me suis fixé pour objectif d’y arriver afin de le voir en train de m’encourager.

Temps de passage à mi-distance : 2:02:59 à une allure de 5’37 » sur le dernier kilomètre (pour une allure moyenne totale de 5’46 » au km)

Malheureusement il était de l’autre côté de la route et je ne l’ai pas vu. Sur cette partie du parcours, le vent s’est alors renforcé, me soufflant en pleine figure et me ralentissant. Mais, bonne nouvelle, j’avais officiellement atteint la deuxième moitié de la course, le moment où l’on se dit que l’on va réellement atteindre la ligne d’arrivée.
Sur cette partie du parcours, on court d’un côté de la route entre le km 22 et le km 32, puis on rebrousse chemin et on court de l’autre côté jusqu’à la ligne d’arrivée. Donc, après le kilomètre 22, à environ 2 heures 10 minutes de course, j’ai vu les meilleurs coureurs passer de l’autre côté de la route et se diriger vers la ligne d’arrivée pour se disputer les premières places. Rien de mieux pour se motiver !
Les km 22 à 32 d’un marathon sont pourtant particulièrement difficiles à bien des égards. À ce stade, vous avez généralement mal partout et votre corps vous supplie d’arrêter. La ligne d’arrivée vous semble pourtant encore très loin et il est difficile de trouver mentalement la force de continuer à courir. Dans mon cas, c’est à ce moment-là que les muscles de ma hanche et à l’arrière de ma cuisse droite, déjà particulièrement contractés pendant les semaines précédant la course, ont commencé à me faire vraiment mal. J’avais également des ampoules sur la plante des pieds et elles ont commencé à me gêner vraiment autour du km 26. Je suis parvenue à franchir cette partie de la course en la divisant encore une fois en mini-objectifs, par exemple atteindre le prochain point de ravitaillement en eau ou le prochain panneau kilométrique où je mangerai quelques dates. Grâce au choix de chansons vraiment géniales qui me servait de bande-son, j’ai pu continuer à avancer sans me dire sans cesse « Il faut que j’arrête ».

Temps de passage à 30 kilomètres : 2:53:04 à une allure de 5’47 » au km (pour une allure moyenne totale de 5’49 »)

Au km 32, j’ai enfin aperçu le tournant du parcours et j’ai ressenti une vraie euphorie. Lors de mon premier marathon c’est au km 32 que mon énergie avait commencé à diminuer et j’avais vraiment eu du mal à atteindre la ligne d’arrivée. Alors cette fois-là, quand j’ai atteint le km 32, ça a été un énorme soulagement. J’avais toujours des tonnes d’énergie, et même si mes jambes et mes pieds me faisaient mal, ils ne semblaient pas vouloir ralentir. Il me restait seulement 9,5 km à parcourir et je pouvais vraiment commencer à m’imaginer en train de franchir la ligne d’arrivée. Plus la peine désormais de me brider et d’économiser mon énergie. Je pouvais me donner à fond et finir la course sans regrets.
Autour du km 33, quand je me suis arrêtée au point de ravitaillement pour boire un peu d’eau, je savais que ce serait mon dernier arrêt. À ce moment-là je ne connaissais pas mon temps exact car je n’avais pas pu noter le nombre de minutes affichées sur l’horloge quand j’avais franchi la ligne de départ. Selon mes calculs, je pensais pourtant avoir encore une chance de finir la course en moins de 4 heures si j’accélérais le rythme et cessais de m’arrêter aux points de ravitaillement. J’ai donc accéléré l’allure pour atteindre une vitesse de presque 5’16” au km, en m’efforçant à tout prix de ne pas ralentir.
J’ai passé le km 35, puis le km 37. Puis, un peu avant le km 38, j’ai repéré le groupe de 4 heures juste devant moi. J’étais tellement aux anges que j’ai commencé à lever les bras en l’air. Je devais avoir l’air d’une folle à sourire comme ça jusqu’aux oreilles au km 38 alors que les coureurs autour de moi grimaçaient de douleur, s’arrêtaient pour se mettre sur le côté en boitillant, massant leur mollet contracté ou leur cuisse douloureuse. Je gardais les yeux rivés sur le meneur, et au km 39, je l’ai dépassé. J’ai continué à accélérer jusqu’à (enfin !) atteindre la dernière ligne droite avant l’arrivée. J’ai terminé sur un sprint (disons plutôt que j’ai couru aussi vite qu’il m’était possible de le faire à ce stade) et j’ai franchi la ligne d’arrivée, triomphante.
Dès que j’ai arrêté de courir, mes jambes m’ont semblé incroyablement raides et lourdes. J’ai fait un tour dans la zone de récupération, été chercher ma médaille, bu de l’eau et mangé un peu puis j’ai rejoint mon fiancée à l’endroit prévu. C’est lui qui m’a appris que j’avais terminé la course en 3 heures 59 minutes et 40 secondes. 20 secondes en dessous de mon objectif ! J’ai probablement terminé avec près d’une minute d’avance sur les premiers coureurs du groupe de 4 heures ; le meneur avait donc malheureusement dû terminer légèrement en retard sur son objectif. Cela me fend le cœur de penser à tous les coureurs de ce groupe. Ils pensaient finir en moins de 4 heures et sont finalement arrivés seulement quelques secondes ou quelques minutes trop tard. Mais je ne regrette pas d’avoir continué à accélérer, même après les avoir dépassés, car autrement je n’aurais peut-être pas atteint mon objectif.

Temps à l’arrivée : 3:59:40 à une allure de 5’27 »/km sur le dernier kilomètre (pour une allure moyenne totale de 5’40 »)

Le marathon de Philadelphie est une course magnifique, avec un public incroyable et de superbes paysages. Dans l’ensemble, je suis ravie de ma performance et j’ai vraiment apprécié cette expérience. Malgré ma blessure, le fait d’avoir cessé de courir pendant un mois entier et des douleurs diverses et variées tout au long de l’entraînement, je suis parvenue à maintenir mon allure tout au long de la course. Dans une chaleur estivale étouffante, le week-end ou en voyage, même malade ou après une nuit blanche, j’ai continué à m’entraîner et je suis arrivée à réduire de presque 21 minutes le temps obtenu lors de mon premier marathon.
J’espère que cette série sur le marathon vous a plu. Que vous ayez envie de participer vous aussi à un marathon, que vous souhaitiez courir quelques jours par semaine ou que vous ayez simplement envie de retrouver la forme, j’espère que vous découvrirez très bientôt le plaisir que peut vous apporter une activité physique. Vous serez surpris de ce dont votre corps est capable si vous lui faites confiance.