On dit généralement que ceux qui font du sport en altitude sont plus performants que ceux qui s’entraînent au niveau de la mer. Mais est-ce bien vrai ?
Il y a un peu plus d’un mois, j’ai déménagé de Boston à Denver, ville que l’on surnomme la « Mile-High City » car elle se trouve à près de 1 600 mètres d’altitude. Très enthousiaste à l’idée d’être si proche des montagnes majestueuses, avec les multiples possibilités de randonnée qu’elles offrent, je craignais en revanche que l’altitude ait un impact sur mon exercice quotidien.
J’étais particulièrement inquiète car ce déménagement survenait en plein milieu de mon entraînement pour le Marathon de Portland du 8 octobre, soit ma troisième course de 42 km. Courir de longues distances étant déjà assez difficile, je n’avais nullement besoin de me compliquer la tâche avec un volume d’oxygène inférieur de 17 % à celui du niveau de la mer. Malgré mes craintes, on me répétait sans cesse que l’entraînement en altitude me permettrait d’atteindre mon pic de forme et de battre mon record personnel sur le marathon.
Alors que ces premières semaines d’entraînement m’avaient particulièrement éprouvée, j’ai voulu savoir si mon nouveau lieu de résidence me ferait réellement progresser sur le long terme, ou s’il rendrait simplement mes courses plus lentes et plus difficiles. Perplexe face aux « on-dit », je me suis d’abord tournée vers les résultats de divers travaux de recherche scientifique.
D’après une étude de 2005 réalisée sur des coureurs de biathlon de haut niveau ayant pour habitude de s’entraîner à 2 000 mètres d’altitude, 3 semaines d’entraînement traditionnel en altitude leur ont permis d’accroître leur activité érythropoïétique, procédé par lequel les globules rouges sont produits, conduisant ainsi à une augmentation de la masse totale d’hémoglobine et du volume de globules rouges, et améliorant par conséquent leurs performances athlétiques. En revanche, le volume de globules rouges revient à la normale à peine 16 jours après avoir quitté les montagnes, ce qui laisse à penser que l’effet n’est que temporaire et n’offre pas d’avantages sur le long terme.
Une étude similaire menée auprès de skieurs de randonnée en 1990 a démontré que 2 semaines d’entraînement en altitude n’ont eu aucune répercussion positive en matière de V2Max, le volume maximal d’oxygène qu’une personne peut consommer, qui est aussi un excellent indicateur de l’état de santé cardiovasculaire. Elle montre par contre une amélioration des performances sportives sur le court terme, qui résulte probablement d’une augmentation de la capacité tampon des muscles, soit la capacité qu’ont les muscles à neutraliser l’acide lactique accumulé pendant l’exercice, retardant ainsi la fatigue. Les chercheurs n’ont en revanche pas testé la durée de ces améliorations.
Sinon, la méthode « Vivre en haut, s’entraîner en bas », qui consiste à entraîner à basse altitude des sportifs vivant en haute altitude (qu’elle soit réelle ou simulée), est devenue de plus en plus populaire ces dernières années. Lors d’une étude menée en 2010, huit coureurs de 400 mètres ont vécu à altitude simulée pendant dix jours, dans une « maison en altitude » comportant 15,8 % d’oxygène, soit l’équivalent de 2 133 mètres d’altitude. Tous leurs entraînements se sont en revanche déroulés en plein air, au niveau de la mer. Un deuxième groupe de dix spécialistes du 400 mètres s’est entraîné et a vécu au niveau de la mer. Le groupe de la « maison en altitude » a amélioré ses temps de courses sur 400 mètres, mais pas le groupe d’en bas.
Bien que ces études démontrent globalement que l’entraînement en altitude permet d’améliorer légèrement les performances une fois revenu au niveau de la mer, nous ne sommes pas en mesure de quantifier ces améliorations, ni d’estimer leur durée.
Ce que ces études n’indiquent pas, c’est le ressenti provoqué par le fait de s’entraîner en altitude. Sur le plan personnel, j’ai trouvé cela particulièrement difficile. Lors de mes deux premières semaines d’entraînement le long du sentier Cherry Creek, j’avais l’impression que mes poumons allaient exploser, malgré une course lente et pénible. Aujourd’hui, cette sensation est partie et je peux désormais imposer mon rythme, mais ma vitesse moyenne est d’environ 9,6 km/h, alors que je me situais aux alentours de 10,5 km/h au niveau de la mer. Je me trouve aussi bien moins endurante sur les longues distances. Cela peut être décourageant, c’est le moins que l’on puisse dire, mais il est somme toute logique que ma vitesse sur la durée soit légèrement plus basse lorsque mon corps doit piocher dans une réserve d’oxygène plus limitée.
Ceci-dit, aujourd’hui, j’espère que ces dix semaines d’entraînement en altitude se montreront payantes pendant mon marathon, car j’arriverai sur place seulement 24 heures avant la course. Je suis convaincue que la plus grande quantité d’oxygène disponible dans l’air rendra ma course plus facile et plus agréable.
Rendez-vous après le 8 octobre pour un rapport complet qui, je l’espère, fera état d’un nouveau record personnel acquis haut la main, que je pourrai rapporter avec moi au milieu de mes montagnes.